"Jésus-Christ a voulu et opéré divinement et humainement notre salut". Homélie pour la fête de S. Martin le Confesseur



"Jésus-Christ a voulu et opéré divinement et humainement notre salut". Homélie pour la fête de S. Martin le Confesseur
En octobre 649, trois ans et demi avant sa condamnation et son exil à Chersonèse, le pape Martin de Rome convoqua à Latran un concile qui publia une profession de foi inspirée par saint Maxime le Confesseur. Ce texte, rédigé en latin et en grec, réaffirme l’attachement des chrétiens d’Occident au concile de Chalcédoine et complète son enseignement par le parallèle entre la dualité des natures et celles des volontés du Seigneur Jésus. Au fond, les évêques occidentaux réunis à Latran répètent un postulat qui est aussi évident que contesté : Jésus le Christ est autant Dieu qu’il est homme. Notre Sauveur est aussi divin qu’humain. Cette harmonie entre les deux natures, conservant chacune ses propriétés, sa volonté et son énergie, est le signe de la réconciliation entre Dieu et l’homme :

De même que nous confessons ses deux natures unies sans confusion, de même aussi ses deux volontés naturelles, la divine et l’humaine, pour confirmer parfaitement et sans amoindrissement qu’un seul et le même, Jésus Christ notre Seigneur et Dieu, est vraiment Dieu parfait et homme parfait, en toute vérité, et qu’ainsi il a voulu et opéré divinement et humainement notre salut.

Cette conviction, pourtant tellement cohérente avec le témoignage des évangélistes et la tradition de l’Église, est la cause des persécutions contre Martin et Maxime de la part de ceux qui jugeaient leur insistance sur les deux volontés du Seigneur comme une nouveauté intolérable, comme une déclaration intempestive et qui voulaient en interdire la proclamation par des décrets et des pressions.

Dire que Jésus est aussi Dieu qu’homme, que son humanité est aussi complète et réelle que sa divinité, c’est une évidence qui eut du mal à s’imposer dans les esprits des chrétiens. Pourtant, c’est le principal message de l’Évangile : sa nouveauté ne consiste pas dans la révélation de l’existence de Dieu, mais dans celle de l’avènement de Dieu parmi les hommes, dans l’annonce de la naissance du Verbe de Dieu en tant qu’homme, de sa descente jusqu’aux abimes de la souffrance et de la mort, de sa résurrection et de son ascension dans la gloire qui désormais est aussi divine qu’humaine. L’Évangile n’est pas un texte sacré, comme il y en a beaucoup dans les religions anciennes et contemporaines, dont l’objectif est de promouvoir une nouvelle divinité ; l’Évangile fait la promotion d’un homme : Jésus-Christ qui, parce qu’il était aussi le Logos de Dieu, a « opéré notre salut divinement et humainement ».

Célébrant aujourd’hui la mémoire de saint Martin le pape, qui a donné sa vie pour défendre la réalité de l’humanité de Jésus-Christ, j’aimerais, frères et sœurs bien-aimés, que vous gardiez dans votre cœur le témoignage des deux Confesseurs : Maxime et Martin, deux des plus courageux théologiens humanistes du premier millénaire. Leur foi commune qui transcende les frontières linguistiques, culturelles et politiques nous rappelle l’incontestable nouveauté et la déconcertante originalité de l’Évangile de Jésus-Christ, en qui le divin et l’humain ont été réunis irrévocablement, dans un mouvement de convergence où Dieu devient homme et l’homme devient Dieu.

Lundi 27 Avril 2015
Alexandre Siniakov